4.Les interviews
Jean-Louis et Maryline -image jpeg 242 x 181 Pour parler des rapaces, nous avons invité l'un des derniers éleveurs de moutons de Rustrel, Jean-Louis Armand, qui a sa ferme aux Viaux. Maryline Castor, présidente de la Société de chasse de Rustrel, est venue apporter le point de vue des chasseurs. 
Max Gallardo était là également. 

- Est-ce que les rapaces vous posent des problèmes ?
M. Armand : Ils peuvent attraper un petit poulet d'une semaine et aussi des pigeons. Un
poulet d'une semaine n'est guère plus gros qu'un moineau.
C'est que des "gris" : ils sont souvent sur les pylônes. Ils attendent de voir une souris, une
taupe, et puis hop, ils plongent d'un coup. (Les "gris" sont des buses)

- Vous voyez le rapace quand il les attrape ?
M. Armand : Oui, oui. Il tourne très haut et puis après d'un coup il les fixe. Il les endort et il les attrape. Il part avec le poulet.

- Est-ce qu'un rapace a déjà attrapé un mouton ?
M. Armand : Des petits moutons qui viennent de naître... Mais c'est très rare car le chien
de berger surveille. Un petit agneau fait 4 kilos.

- Est-ce que vous avez été obligé d'utiliser votre fusil ?
M. Armand : On n'a pas le droit, c'est interdit de les tuer.

- Qu'est-ce que vous faites quand il les attrape ?
M. Armand : J'envoie le chien. Des fois, la peur du chien lui fait lâcher le poulet. J'ai sauvé un gros pigeon. J'ai tapé des mains, je suis parti avec le chien dans les mines. Le pigeon avait les plumes du dos un peu arrachées.
Mais souvent il est mort : tout de suite le rapace l' assomme, il lui creuse la cervelle.
C'est surtout au mois de mai, vers le 15, ils chassent pour nourrir les petits. Quand je
garde les moutons, je les vois ; le chien aussi.
Les autres choses qu'ils détruisent, ce sont les nids de pies. Les pies ne sont pas assez
nombreuses pour se défendre, et ils mangent tous les petits.
Les corbeaux non, quand ils arrivent, ils sont au moins une trentaine. Ils combattent le
rapace et il se sauve. Ca je l'ai vu dans les peupliers, où les corbeaux font leurs nids.

Image jpeg 181 x 240Jean-Louis Armand
Le coq, l'oie et surtout le dindon protègent toute la basse-cour. Le coq chante quand il y a le renard ou la buse.
En ce moment, il y en a des renards. C'est entre le premier et le 15 mai, quand ils ont les
petits. Ils guettent dans le blé qui est haut. Quand une poule passe au bord du blé, ils
l'attrapent. J'entends le coq qui chante, qui chante. Je regarde en haut, il n'y a rien,
j'entends bouger dans le blé, c'est le renard avec la poule. Tous les soirs, vers les 9 h, j'en vois deux, trois.
Le plus qu'on en voit, c'est à la fin de l'été, au mois de septembre, après les chaleurs.
Même les gros corbeaux attrapent les petits poussins, les petits poulets.

- Quand vous avez une bête morte dans le troupeau, vous en faites quoi ?
M. Armand : Quand j'avais des petits agneaux [morts], des petites bêtes, je les portais
dans la bruyère. Quand j'avais des brebis [mortes], je les enterrais avec le tracteur.
Maintenant c'est interdit depuis janvier 97. C'est l'équarrissage de Marseille qui vient me
les prendre gratuitement. Il faut que les bêtes fassent 40 Kg. Autrement on paie 200 F la
bête.

Max  Gallardo : Il y a aussi la possibilité de faire vous-même un petit enclos - afin d' éviter  que les renards ou les chiens viennent- pour donner à manger aux rapaces, pas très loin  de l'exploitation, dans un endroit un peu isolé. Ce qu'on a fait de l'autre côté du Luberon,  vers Manosque, ce sont des containers réfrigérés : quand il y a une bête morte, les gardes  forestiers vont la prendre pour la congeler et la mettre dans le charnier. Ca permet de  nourrir les rapaces.
Ici il n'y a pas assez d'éleveurs. Nous avons mis en place des aires de nourrissage dans le Luberon pour les rapaces.

M. Armand : Oui, on n'est plus que trois. On était quatre.

Les rapaces ne représentent donc qu'une moindre menace pour les bêtes de la ferme par rapport aux renards. Et la disparition des éleveurs comme les contraintes sanitaires ont diminué leur nourriture.