François Morénas,
ardent défenseur du "Colorado Provençal"
François Morénas, patron de l'auberge de jeunesse de Regain à
Saignon, - A quel âge avez-vous
commencé à faire des sentiers ? -Pourquoi avez-vous fait
ces sentiers ? - Avez-vous touché
de l'argent ? - De quoi vous servez-vous
pour faire des sentiers ? - Quel genre de peinture
utilisez-vous ? - Quels sont les livres
que vous avez écrits ? - Avez-vous des cartes
? - Combien de sentiers
avez-vous fait ? - Est-ce que c'est
vous qui repeignez ? Ce sont surtout les gens qui
séjournent à l'Auberge de Regain qui me font plaisir. Les randonneurs utilisent les sentiers, mais
ne les entretiennent pas. - Est-ce que vous trouvez
beaucoup de déchets ? Il y a une question qu'on n’a
pas posée, c'est cette dénomination de « Colorado Provençal ». De tout
temps, ce qu'on appelle maintenant le Colorado, s'appelait « Les Ubacs de Rustrel ». L’abbé
Martel, qui était président du mouvement « Alpes de Lumière », qui était
là pour mettre en valeur tous les sites de la région et qui a fait un travail et forme de connaissance
du pays d'Apt, s'est entiché comme moi de ce Colorado Provençal. Il arpentait les sentiers avant
moi pour créer son GR 6. C’est lui qui a baptisé cet endroit « Colorado Provençal ». Beaucoup de gens sont déçus
parce qu'au mot « Colorado », ils croient trouver l'Amérique. Ils croient trouver
des canyons énorme, des gorges... Il y a des petits ravins, des petites gorges très sympathiques
mais il n'y a pas de canyon, on n’a pas l’équivalent, loin s'en faut, des gorges d’Oppedette qui sont un
peu plus loin, ni des gorges de la Nesque. L’abbé Martel, justement, a baptisé cette région
« Colorado » non pas à cause des canyons, mais à cause des couleurs, de la
couleur qui plus belle que celui d'Amérique. (Colorado
signifie « rouge » en espagnol)
Les couleurs sont beaucoup plus extraordinaire parce que plus variées. - Et pourquoi on dit
« cheminées de fée » ? - Eh bien nous vous remercions,
monsieur Morénas. Contact : Auberge de jeunesse
de Regain, à Saignon, 84400 APT, tél 00 33 490 743 934
a été cinéaste ambulant et amoureux du Colorado Provençal.
Dans les années 60, il trace et balise les premiers sentiers de découverte du Colorado.
Il était venu projeter à l'école le film " La Vallée qui Saigne ",
l'un des rares documentaires consacrés à l'ocre.
- Eh bien, j'ai commencé
à mettre de la peinture pour baliser des itinéraires à faire à pied à l'âge
de 23 ans, en 1937. Dans le Colorado, beaucoup plus tard... Vers 1953. Il y avait des sentiers de grande randonnée,
le GR 6, qui devait passer par le Colorado. Alors on m'a dit : " Si vous voulez, vous allez faire ce secteur
là " Et après, je me suis passionné à faire découvrir le Colorado dans
ses détails.
- Parce que c'est agréable
pour moi de les faire, parce que j'ai toujours aimé partager mon plaisir avec les autres...
- (Rires) Oh oui ! La première
année, en 1954, la municipalité de Rustrel m'a donné, si mes souvenirs sont bons... 10 000
anciens francs. 100 F !
- Je me sers surtout maintenant,
pour les entretenir, de cisaille pour couper les petites branches. Mais lorsque j'ai fait ces sentiers, je me servais
de serpes, celles qu'on appelait les "fourchouns " en Provençal. Et puis de la scie pour certaines
branches, et surtout de la pioche, avec un côté qui fait coupe-bois comme une hache. Je faisais à
peu près 300 mètres de sentiers par jour. Je suis arrivé à créer 7 à
8 km à la main sur les douze kilomètres de sentiers balisés que ça représente.
- Pour ne pas faire double emploi
avec le GR, j'ai balisé tout mon itinéraire qui fait le tour du Colorado avec du jaune. Et j'ai aussi
du bleu pour faire des variantes, des croix bleues, des points bleus, des traits bleus... Pour des quantités
de petits itinéraires pour des gens qui ne veulent pas marcher trop longtemps. Avec notre guide, ils peuvent
faire des promenades d'une heure, de deux heures... Alors que le grand circuit fait 12 h. J'utilise de la peinture
ordinaire à l'huile, avec un pinceau.
- Il y a des petits guides de
randonnée pédestre, il y a le Colorado Provençal, les Monts de Vaucluse, le Luberon,
le Ventoux et les Dentelles de Montmirail. J'ai écrit d'autres livres : " L'hôtel des Renards
", l'histoire de mon auberge de jeunesse de 1936 1940. Mes histoires de cinéma ambulant de 1946 à
1953. Il y a d'autres livres, " Clermont des lapins ", l'histoire de mon auberge de jeunesse pendant
la guerre, sur le plateau des Claparèdes au-dessus d'Apt, écrit depuis bien longtemps. Il va être
publié cette année.
- Oh, toutes les cartes sont
moins précises que ce que j'ai dans la tête ! Ce qui m'a servi beaucoup, c'est le plan du cadastre
de Rustrel. J'y ai relevé tous les anciens noms des chemins. C'est très intéressant.
- C'est difficile à dire
ça... À peu près 1500 km entre le Ventoux, les Monts de Vaucluse et le Luberon.
- En principe oui, mais quelquefois
j'ai des aides. La dernière fois qu'on a rebalisé, c'est un jeune Belge qui était employé
au parking du Colorado qui m’a donné un très bon coup de main en rebalisant les points jaunes. Maintenant,
nous attendons les bonnes volontés. Si parmi vous il y en a qui, en été, pendant les vacances,
veulent me donner un coup de main, je les embauche volontiers. Je leur prête un pinceau, un pot de peinture,
et je leur dis : « Vous ne faites tel itinéraire ». Je laisse les bénévoles
dans un endroit et je les reprends plus loin. C'est agréable pour eux, ils n'ont pas à revenir.
- Eh bien non
! J'avoue que c’est formidable, que c'est très étonnant, mais c'est insignifiant. Dans l'ensemble,
les gens qui font le Colorado ont lu nos guides dans lesquels on les prévient : on leur explique que ce
sont des propriétés privées, qu'ils doivent respecter le lieu, respecter la Nature. Maintenant,
nous ne sommes pas responsables des gens qui viennent le dimanche faire un petit tour au pied des cheminées
de fée, qui ne connaissent rien aux sentiers, rien à la marche à pied, qui sont en général
déçus parce qu'il n'y a pas de buvette, pas de marchands de souvenirs, et ces gens-là laissent
des bouteilles de bière, laissent des papiers... Ces gens n’ont aucune éducation. Pour ces gens-là
alors oui, il faudrait mettre des poubelles au pied des chemins de fée.
François Morénas
était venu dans la classe.
- Il y en a partout.
Et ce qu'on appelle « cheminées de fée », ce sont des falaises très
découpées où il y a un chapeau plus dur qui empêche l’érosion. Ici, ce sont les
lances des ouvriers ocriers qui ont provoqué le phénomène.
François Morénas est aussi célèbre pour son festival annuel des films classiques. Chaque
été, il projette des trésors du cinéma muet ou d'avant-guerre.